Ouest Américain

15 septembre

La journée sera essentiellement consacrée à la logistique, dans la ville de Cortez : lavage de la carrosserie du camping-car et lessive le matin, courses en début d’après-midi. Nous préférons faire les courses alimentaires ailleurs qu’à Walmart car il y a plus de choix et des produits qui nous semblent être de meilleure qualité. Les contenances sont aussi plus en accord avec nos moyens de stockage. A titre d’exemple, à Walmart le shampoing se vend en flacon de 750 ml. Cela ne nous dérangerait pas en soi, mais un tel flacon ne rentre pas dans l’étagère de la douche du camping-car.

Comme en France, certaines mayonnaises et certaines boites d’œufs mentionnent que les poules n’ont pas été élevées en cage. Quant à l’alcool, la situation dépend des états. En Californie il y a par exemple du vin dans les supermarchés. En Utah et dans le Colorado il faut se rendre dans un magasin spécialisé.

Nous prenons la route en milieu d’après-midi en direction de Monument Valley. Nous nous arrêtons pour la nuit dans un camping sommaire en bord de rivière aux environs de Bluff.

16 septembre

Plutôt que d’aller directement à Monument valley, nous passons par Valley of the Gods après une vingtaine de minutes de route depuis le camping où nous avons passé la nuit. Une route revêtue de petits cailloux sillonne sur 27 km dans un fabuleux paysage semblable à celui de Monument valley. Un ranger de Mesa Verde nous avait donné l’idée de passer par là. Ce n’est pas un National Park ni même un State Park, le territoire appartient au Bureau of Land Management, si nous avons bien compris. La voie semble en bon état, et nous décidons de nous y engager.

Nicolas se félicite depuis le début de voyage d’avoir équipé le camping-car de roues plus grandes que celles de série. Non seulement cela nous permet de passer plus aisément sur certaines voies non goudronnées, mais c’est aussi pratique en ville. En effet, sur les parkings le porte-à faux peut ainsi surplomber des bordures et avoir le même encombrement en longueur qu’une voiture normale.

Les paysages sont sublimes. Des rochers monumentaux s’élèvent au-dessus de la plaine désertique.

Il y a beaucoup d’endroits pour se garer au bord de la route, nous nous arrêtons à l’un d’eux pour déjeuner. Par endroits des rochers semblent se trouver en équilibre instable. Marie ne voudrait pas être ici lors d’un tremblement de terre et Stella est d’accord.

Nous poursuivons la route après le déjeuner et rencontrons 3 ou 4 passages plus difficiles où nous sommes amenés à sortir du camping-car pour mieux nous rendre compte où passer. Une fois, le marchepied frôle presque le sable, mais finalement ça passe bien. Heureusement car faire marche arrière aurait été compliqué.

Nous arrivons le soir à Goosenecks State Park, situé au bord d’un impressionnant canyon en méandres creusé par la rivière San Juan. Nous y passons la nuit au camping.

L’emplacement choisi était situé à côté d’un autre emplacement occupé par un van, sa propriétaire profitait des beaux paysages et de la tranquillité. En voyant notre troupe sortir du camping-car, elle part s’installer plus loin sur un autre emplacement. Effectivement chez nous il y a beaucoup de joie de vivre. Quant à la quiétude, il vaut mieux la chercher ailleurs.

Le soir, les 3 (un  peu) grands déjà couchés font une expédition aux toilettes du camping. Justine découvre un ciel étoilé. Sur le chemin, Marie lui montre la Grande Ourse et Cassiopée. « Ah, mais c’est grand les constellations ! » s’exclame Justine.

17 septembre

Après un bref passage dans le Colorado, nous arrivons en Arizona et à Monument Valley. C’est un parc situé sur le territoire des indiens Navajo et géré par eux. Monument Valley est un territoire  sacré pour eux. Des familles habitent sur le territoire du parc.

Les amérindiens en général et les Navajos en particulier ont beaucoup souffert de l’arrivée des colons. Ils ont été exterminés à une époque, dépouillés de leurs habitats pour se voir attribuer des terres pauvres. Les Navajos ont été déportés et ont dû faire 300 miles à pied pour revenir sur leur territoire 4 ans plus tard. Les amérindiens n’ont été reconnus comme citoyens des Etats-Unis qu’en 1924 et ont eu le droit de vote en Arizona en 1953.

Or pendant la deuxième guerre mondiale non seulement des dizaines de milliers d’indiens se sont engagés, mais en plus les Navajos « Code Talkers » (Diseurs de Code) ont joué un rôle clé dans la réussite des opérations navales dans le Pacifique. En effet, environ 400 Navajos encodaient d’un côté et déchiffraient de l’autre côté les messages sensibles en se basant sur un code développé à partir de leur langue natale. Dans l’histoire militaire ce système de codage reste le seul à n’avoir jamais été déchiffré par l’ennemi.

Même de nos jours, beaucoup d’indiens semblent vivre dans des conditions précaires. On se demande pourquoi des indiens se sont engagés sous les drapeaux après tout ce qu’ils ont subi. Peut-être que leurs conditions de vie étaient si difficiles que s’engager dans l’armée était leur seule option.

Nous admirons les beaux panoramas du parc depuis le visitor center. Les paysages ressemblent beaucoup à ceux de Valley of the Gods. Une piste permet de visiter le parc mais il n’est pas clair si notre camping-car peut s’y engager ou pas. A l’entrée on nous a indiqué que oui. Cependant, les dépliants, les panneaux et le visitor center nous indiquent que ce n’est pas autorisé aux camping-cars. Des excursions en 4×4 sont proposées. Cependant, cela ressemble à ce que nous avons vu la veille à Valley of the Gods. De plus un vent violent soulève des nuages de poussière. Finalement nous décidons de quitter Monument Valley et de poursuivre notre route.

Nous arrivons en milieu d’après-midi au camping de Canyon de Chelly National Monument. Stella remarque une copine potentielle et demande à être introduite. Cette fois, Justine décide de venir elle aussi.

Andrew, le papa de la petite fille, est géologue. Il a passé 15 ans en Indonésie à explorer des gisements potentiels de pétrole. Il est de retour aux Etats-Unis avec sa femme et sa fille. Ils voyagent en camping-car depuis trois mois pour découvrir le pays.

Andrew nous parle de l’influence des organisations de défense de l’environnement. Ils ont beaucoup de poids aux Etats-Unis, ce qui est à son avis une bonne chose. L’exploitation du gaz de schiste se fait essentiellement sur des terrains privés. En effet, les Etats-Unis sont probablement le seul pays dont le propriétaire des terrains détient le droit d’exploiter les ressources du sous-sol.

18 septembre

Lorsque nous nous réveillons à 8h30, Andrew et sa famille sont déjà partis. Stella est triste, elle aurait aimé jouer encore avec sa copine.

Nicolas se lance dans le nettoyage du vaste tableau de bord, recouvert d’une épaisse couche de poussière après les différents vents de sable rencontrés. Cela prend du temps mais le résultat en vaut la peine.

Nous partons ensuite à la découverte du Canyon de Chelly. Une route permet d’accéder à plusieurs points de vue sur les deux canyons du parc, le Canyon de Chelly lui-même et le Canyon del Muerte. Les deux canyons se rejoignent près de l’entrée du parc. Il est interdit de descendre au fond des canyons sans guide. Bien que ça soit un monument national, il y a des fermes indiennes au fond des canyons, nous en verrons quelques unes depuis les points de vue.

Au canyon del Muerte l’eau a sculpté les rochers en grès. Dans le canyon de Chelly en revanche ce sont des roches rouges.

Leurs méandres ainsi que les gorges secondaires font que, même en regardant depuis le bord des canyons, nous avons souvent du mal à trouver le prolongement du canyon principal.

Nous sommes toujours sur le territoire des Navajos. Des vendeurs d’artisanat local sont présents à presque tous les points de vue. La saison touristique est finie et les vendeurs sont presque aussi nombreux que les visiteurs du parc.

Dans le cadre du programme pour enfants de ce parc, une activité demandée est de ramasser des déchets. Ils s’y lancent avec enthousiasme et ramasseront 2 sacs pleins en une journée.

Le soir, nous retournons passer la nuit au même camping que la veille, à l’entrée du parc.

19 septembre

Comme la météo l’a prédit, le vent est fort.

Nous décidons de ne pas faire la randonnée accessible sans guide. En effet, elle comporte au début une descente de 200 mètres au fond du canyon, qu’il faudra remonter à la fin. Nous estimons que ce serait trop pour Justine et Stella.

Nous nous arrêtons faire quelques courses dans le supermarché de la ville. Nous sommes toujours en territoire Navajo. Les panneaux sur le parking demandent de protéger la communauté et de ne pas donner d’argent aux quêteurs.

Nous faisons ensuite le plein de diesel. Avant que Nicolas puisse mettre ne serait-ce que 5 gallons dans le réservoir, deux personnes ont le temps de venir le voir pour demander de l’argent.

Après un déjeuner à Burger King, dont les enfants ont apprécié la belle aire de jeux, puis deux petites heures de route, nous arrivons à Petrified Forest National Park.

Pas de camping ici mais il est possible de passer la nuit sur le parking d’un magasin de souvenirs à la sortie du parc. Une bonne surprise nous y attend. C’est gratuit et les emplacements sont espacés, il y a des tables de pique-nique abritées du soleil par un toit et deux tipis pour que les plus petits puissent jouer aux indiens. Le parking est décoré de morceaux de bois pétrifiés. Nous sommes les premiers, deux autres voitures arriveront ensuite.

Clara, Maxime et Justine jouent aux indiens dans le tipi. Stella revient car « il fait noir dedans et ça fait peur ».

20 septembre

Le vent s’était calmé pendant la nuit mais il est prévu qu’il revienne en cours de matinée. Nous commençons la journée par des promenades à Petrified Forest National Park tant que la météo est plus clémente et visitons le musée dans l’après-midi.

Nous avons changé d’heure sans changer de fuseau horaire ni d’état. En effet l’Arizona ne passe pas à l’heure d’été contrairement au territoire Navajo où nous étions auparavant.

Nous commençons par une petite balade aménagée derrière le musée. Le sentier serpente entre les morceaux de bois pétrifiés. L’écorce a gardé son apparence et elle parait vivante même au toucher.  Les troncs sont complètement pétrifiés. Le bois est remplacé par du quartz et d’autres minéraux. C’est plus beau que les 2 troncs pétrifiés que nous avions vus à Valley of Fire il y a quelqu es semaines. Les enfants sont admiratifs devant tant de beauté. Justine et Stella demandent à Marie de prendre en photo chaque rondin devant lequel nous passons. Cette requête, certes légitime, se heurte à un obstacle de taille : il y en a beaucoup des troncs pétrifiés ici.

Maxime demande si on a utilisé la tronçonneuse pour couper le bois pétrifié. Il y a un tronc particulièrement gros et beau exposé au musée. Il a fallu 10 heures environ pour le couper alors que 3 petites heures auraient suffi pour un morceau équivalent de granit.

Nous souhaitons faire une autre promenade, Long Logs, dont le départ se situe un peu plus loin de l’autre coté de la route. En marchant sur le trottoir Clara remarque un serpent. Nicolas et Maxime sont passés sans le voir. Celui-ci « fait moins peur que l’autre serpent, car il est beaucoup plus fin et plus court » raisonne Justine en faisant référence au serpent à sonnette rencontré à Mojave. Il y a une bordure un peu haute au bord du trottoir pour consolider un petit talus. Le serpent qui aimerait bien s’échapper n’arrive pas à la franchir. Le temps qu’il décide de quel côté contourner l’obstacle nous avons le temps de l’observer. Une voiture de rangers s’arrête et nous rassure quand à la non-dangerosité de ce serpent. Les filles osent s’approcher un peu pour ensuite le contourner.

Notre deuxième sentier nous fait passer devant plusieurs troncs de bois qui à l’époque faisaient visiblement partie des grands arbres. Nous pouvons apprécier la taille de ces arbres car même si les troncs se sont naturellement cassés en rondins après la pétrification, les rondins restent alignés.

L’après-midi, nous passons au musée voir le film et l’exposition. Il y a environ 200 millions d’années, ce qui est actuellement l’Amérique du Nord était situé près de l’équateur. Le climat ressemblait à celui du Costa Rica d’aujourd’hui, avec des forêts tropicales et des dinosaures.

L’après-midi nous rencontrons sur un sentier une famille québécoise avec 5 enfants. Les parents sont chasseurs de têtes dans le domaine informatique et travaillent à leur compte. Depuis quelques années ils prennent 2 mois en août-septembre pour voyager, et passent 6 semaines en Floride l’hiver. Ce sont des périodes creuses pour eux, il y a peu de recrutements. Les enfants suivent les cours par le CNED (français). Ils nous indiquent que le climat des affaires se serait nettement amélioré depuis l’élection de Donald Trump.

Sur le même sentier, nous voyons quelques troncs qui paraissent en état de pétrification moindre. La couleur du tronc est marron très claire et on peut observer la structure en fibres du tronc, même si on aperçoit bien les minéraux ayant pénétré la structure. Dans la Vallée des dinosaures au Canada, les panneaux mentionnaient 2 degrés de pétrification des os, pour ainsi dire total et partiel. Dans le premier cas, les minéraux ont remplacé la matière initiale alors que dans le deuxième cas ils ont rempli le vide existant dans la structure.

Nous roulons jusqu’à d’autres points de vue. La route passe entre des collines « tigrées ». Marie est enchantée contrairement aux enfants qui ont déjà eu leur dose de merveilles aujourd’hui.

Le soir nous rentrons dormir au même endroit, sur le même emplacement. Il y a plus de monde que la veille.

21 septembre

Le vent se lève et souffle encore plus fort que les autres jours bien qu’il ne fasse pas froid du tout, autour de 30 degrés. Nous partons faire une randonnée dans le nord de Petrified Forest National Park, au « Painted desert ».

Le vent est tel que nous laissons nos chapeaux de soleil dans le camping car.

Nous passons au visitor center pour les médailles des enfants. D’après un employé du parc, lorsque quelqu’un se fait mordre par un serpent à sonnette il a environ 2 heures pour se faire injecter l’antidote. Au-delà de cette limite, la personne se trouve en danger de mort.

Nous partons vers l’est et quittons l’autoroute pour passer sur un tronçon de la Route 66. C’est du folklore mais tout le monde a bien aimé voir les restos, motels et voitures d‘époque. Toute une ambiance !

Nous allons dans un camping avec des douches à Homolovi Ruins State Park, sur notre route. Nous en profitons pour voir les ruines d’un village Homolovi. D’après l’exposition du visitor center, cette civilisation ressemblait à celle des Pueblos mais la plupart des ruines ont été abimées par des hommes inconscients avant d’être reprises par des archéologues.

Nous arrivons au camping balayé par le vent. Nicolas a choisi un emplacement près des sanitaires. Le temps de se laver, l’heure de diner arrive. Le soleil se couche vers 19 heures et le vent devient froid.